« Liberté », « égalité », « fraternité », « Non à la haine ». Ces valeurs de la République brandies sur des feuilles A4 par quatre adolescentes résument les motivations des cinq cents manifestants qui ont formé une chaîne de solidarité, ce dimanche 18 octobre, aux abords du collège public Jean-Rostand, aux Herbiers.
Parents, élèves, enseignants et citoyens de tous horizons ont répondu à l’appel du conseil local de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) de l’établissement, émis la veille par mail et via le site internet du collège, afin de « rendre hommage à Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie assassiné » par un terroriste islamiste, vendredi 16 octobre, à Conflans-Saint-Honorine.
« C’est important d’être là ensemble, aujourd’hui, pour défendre notre liberté d’expression et apporter notre soutien aux professeurs », commente Nadège Chauvet, présidente de l’association. Son fils Bastien, scolarisé en 5e, dit son incompréhension et ses craintes. « C’est normal de parler d’enseignement moral et civique, indique-t-il. Alors ça fait peur de se dire que ça peut arriver. »
« Personne ne doit avoir peurd’enseigner la liberté »
Partout, l’effroi perse dans les regards et dans les paroles. Au nom de l’Association culturelle des musulmans des Herbiers, l’imam et des fidèles sont venus « dénoncer l’horreur, indique Nakkachi Hicham, à un moment où tous redoutent les amalgames. Pour nous, c’est un devoir d’être là et de dire non. Ce qui s’est passé est incompréhensible, irrationnel et tout à fait contraire à l’islam. Rien ne justifie une telle inhumanité. »
« Votre vue est excellente, c’est votre vision du monde qui est monstrueuse », dit le dessin accroché sur le manteau d’une manifestante.
Tenir la ligne des valeurs républicaines, c’est un leitmotiv. « Personne ne doit avoir peur d’enseigner la liberté, ni craindre des plaintes ou des attaques, appuie Sylvie Lavaux, mère de deux lycéens. La France est laïque et doit le rester. Chacun a droit à ses opinions, mais sans les imposer aux autres. Le mélange de cette diversité est une richesse, c’est comme cela que notre pays est beau. »
« Choqués » et « indignés », les enseignants se montrent déterminés face à la violence et à la menace. « Charlie hebdo est un support de travail au même titre que les textes de Voltaire, et je continuerai à l’utiliser, affirme Nathalie Hucteau, professeure d’histoire et géographie. Il n’y a pas que la religion musulmane qui est ciblée dans cette publication. Toutes les formes de croyance sont visées. »
Les manifestants se sont répartis le long de l’avenue Charles-de-Gaulle aux Herbiers, entre le collège Jean-Rostand et la rue de l’Etenduère.
Et de rappeler que ses cours ne sont pas qu’une litanie de dates. « On réfléchit ensemble et l’on explique les causes et le sens des événements ». « Les établissements scolaires sont le lieu où l’on peut construire son esprit critique de façon éclairée, abonde Roselyne Perrais, principale adjointe. Cela doit continuer. »
Les paroles et les actes du gouvernement seront déterminants pour continuer à travailler sans céder du terrain à l’obscurantisme. « J’ai foi en l’éducation et en la transmission, appuie Florence Bardoul, professeure de français et de latin. Nous devrons rester vigilants. Il faudra faire en sorte que cela ne se reproduise pas et j ’espère que des actions seront mises en place. »
Sandrine Houdeyer, la principale du collège Jean-Rostand, y pense déjà : « Des temps de parole seront sans doute indispensables avec les élèves à la rentrée. » Pour le reste, la balle est dans le camp du ministère de l’Éducation nationale.
Ouest-France Roselyne SÉNÉ.
Publié le 18/10/2020 à 20h04
Reportage